Agrégat de parpaings, de fer à béton et de métal rouillé, la ruine contemporaine ne répond pas dans sa matérialité aux images pittoresques des jardins romantiques du 18 et du 19ème siècle. Une filiation existe pourtant dans la dimension pastiche de certaines ruines contemporaines. A l’instar des constructions romantiques simulacres d’un reste de ce qui n’a jamais existé, les ruines regroupées dans cette série sont des édifices inachevés qui n’ont en général jamais servis. Victimes d’une crise économique, sujet à un montage promotionnel hasardeux, ces opérations qui n’arrivent pas à terme dénotent dans un monde du tout fonctionnel et de l’efficacité. Leur présence dans le paysage peut apparaitre comme une erreur, un souvenir, un signal, une sculpture. Au-delà du dégoût, de la crainte ou de la laideur que ces constructions peuvent susciter tant leur inachèvement appelle à une dégradation accélérée, les ruines inachevées apparaissent surtout comme une mise en garde à l’image des figures de vanité dans les natures mortes du 19ème siècle. La puissance de la tractopelle, la gravité du béton, et les entrelacs de ferraille, dans leur immobilisme reflètent la fragilité d’un monde mu par des enchainements logistiques.